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•••   É𝐜𝐨𝐭 𝐝𝐮 𝐒𝐢𝐥𝐞𝐧𝐜𝐞   °°°

••• É𝐜𝐨𝐭 𝐝𝐮 𝐒𝐢𝐥𝐞𝐧𝐜𝐞 °°°

Dernier Vertige avant l'Oubli.


Opus Dei

Publié par ¤Fil@ment¤ sur 9 Juillet 2009, 20:12pm

Catégories : #Souven@nces ()

 

        "Qu'est-ce qu'il t'arrive ?" Je ne sais plus le nombre de fois où tes oreilles ont eu droit à cette question. J'ai bien dû te la poser à chaque fois que l'on s'est vus dans cette vie. Et, bien sûr, jamais les miennes n'ont eu de réponse satisfaisante.  Non qu'elles eûrent besoin d'être satisfaites, pour apaiser une conscience ou pour fermer les yeux sur ton train d'existence et continuer jusqu'au prochain arrêt. Encore aujourd'hui j'ignore si j'aurais su t'être d'une quelconque utilité. Parler n'aurait sans doute pas résolu ce qui te minait, n'aurait sans doute rien soulagé de ce qui n'affleurait même pas aux oreilles du dehors, mais au moins ...  Tu n'as jamais voulu mettre des mots sur tes maux. Jamais. J'ai marché auprès de toi pendant toutes ces années bigarrées, j'ai partagé avec toi tout ce que deux êtres  peuvent partager, et sans doute même plus, bien plus que cela; nous avons tout fait ensemble, absolument tout, et sûrement son contraire...
... Mais nous ne fûmes jamais que des étrangers l'un pour l'autre. Je m'en rendais compte incidemment, les années passant, sans trop essayer de changer les choses : je n'avais pas prise sur elles. Et je te voyais t'en aller, puis revenir, pour mieux repartir, pour encore mieux revenir, pour repartir de plus belle... Pour ne plus revenir. Je te voyais t'éloigner dans le rétroviseur de ma mémoire, je le voyais mais je n'ai rien fait pour te retenir. Qu'aurais-je pu faire ? Qu'aurais-je pu te dire ? Tu n'étais déjà plus d'ici, et depuis longtemps. Je crois même aujourd'hui que tu n'as jamais appartenu à ce monde. Pas parce qu'il te décevait : tu l'as au moins autant déçu, consciemment; presque délibérément. Ni parce que tu n'y trouvais pas ta place : tu l'avais conquise depuis fort longtemps. Ni même parce que 'personne ne te comprenait' : tu le reconnaissais, la personne qui te comprenait le moins, ce n'était jamais que toi. Du reste, la plupart de tes semblables te comprenaient mieux que toi-même.


          Il a fallu que je tombe par hasard sur une connaissance commune pour apprendre, encore plus par hasard, le terrible secret que tu gardais au fond de toi. Il a fallu qu'un enfant meure dans les bras de sa mère, tué par un chauffard ivre qui n'a même pas su assumer la gravité de son acte, pour que je relie des éléments d'un puzzle entre eux, un puzzle fait de non-dits, de silences et d'allusions, de malaises et de retenues. Au milieu des sourires que tu semais parmi les tiens, il y avait toujours dans ton regard aurifère une seconde d'éternité vorace où le brouillard le disputait au soleil. Où la brume de tes yeux provoquait les commissures de tes lèvres en duel, leur reprochant presque de vouloir se dérider. De désirer oublier. D'aspirer à faire ce pourquoi elles te furent offertes : sourire. De ne vouloir que vivre.
De ne vouloir que Vivre...


          J'ai tant vu l'aurore danser dans tes yeux. Si majestueux en était le spectacle, aussi sombre était le décor que l'on sentait planté derrière; comme un jeu d'ombres chinoises où les silhouettes vides se seraient cachées de leurs propres contours spectraux pour échapper à l'emprise des reflets jaunis de l'âme sur les remparts de l'existence. J'ai tant vu... que je n'ai rien vu venir. Sonde mon souvenir, regarde ma désolation offerte aux cratères de l'acte manqué, de l'acte manquant : tu n'y verrais que frustration et peine et honte. Je n'ai pas réussi à te sauver de toi-même. Tu avais le temps, l'occasion et la possibilité de te confier à moi. Tu ne l'as jamais fait, et secrètement je t'en ai voulu, parce que je pensais que tu ne me faisais pas confiance, après tant de moments partagés... Aujourd'hui, combien je comprends ma méprise. Combien je déteste ces jours où tu ne répondais pas lorsque je t'appelais. Combien je me sens proche de ces êtres que tu allais voir et que j'avais maudits, parce que, ne sachant pas qui ils étaient, ils devenaient pour moi des 'rivaux', ils m'arrachaient à toi, t'éloignaient de moi et de ce qui avait fait la force de notre relation pendant tellement de saisons. Combien je m'en veux de tous ces reproches, adressés ça et là en réponse à ton mutisme forcené, ... Mais m'en vouloir et me flageller continuellement n'y changeront rien : tu ne reviendras pas. Tu ne reviendras plus. Les Bonheurs sont faits pour n'être qu'éphémères, fugaces et météorites. Tu as rendu ma mémoire idoine : il me reste mille éternités pour m'en souvenir.


          Mais... Pourquoi ne me l'as-tu pas dit.... ? Pourquoi diable ne me l'as-tu pas dit tout ce temps où nous étions encore au royaume des mourants ? Pourquoi dois-je te survivre plus d'une montagne ... ? J'étais ton amie. La seule qui connaissait ton coeur. La seule qui ne saura plus jamais pleurer : j'ai liquidé tout mon fleuve de regrets en mémoire de toi, et toute onde qui viendra à présent ne sera que petits ruisseaux sans saveur.
J'étais ton Amie, et mille éternités ne suffiront pas pour que je l'oublie. Laisse-m'en au moins une où je pourrais recroiser l'aurore dans tes yeux, enfin débarrassée de son envers crépusculaire où tu es retournée, parmi des essaims d'étoiles chatoyantes, ultimes poussières d'or dans le rivage pérenne d'Avant, d'Après et d'Ailleurs.
Sais-tu le feu qui me manque de toi ? Je suis à jamais l'Amie des Sphères, à jamais l'écrin de tes larmes inamovibles. Et là où passe désormais l'empreinte de toi dans les nimbes, fais ce que tu savais mieux faire que quiconque au milieu de nous : vis tout le long de ton étoile consumée.
Âme immémoriale, je te salue, moi l'Amie mémoriale, pour toujours ton archive.

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