Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

•••   É𝐜𝐨𝐭 𝐝𝐮 𝐒𝐢𝐥𝐞𝐧𝐜𝐞   °°°

••• É𝐜𝐨𝐭 𝐝𝐮 𝐒𝐢𝐥𝐞𝐧𝐜𝐞 °°°

Dernier Vertige avant l'Oubli.


(Equinoxe du Pauvre)

Publié par ¤Fil@ment¤ sur 23 Août 2010, 16:39pm

Catégories : #*Fou d'aises & foutaises*

 

Vincent, viens-t'en : ici c'est le Québec ! Vincent, accours donc, l'avion ne partira pas sans toi, ni sans elle d'ailleurs.

Pousse-toi plus loin dans l'infini, et vois : dix-mille escales plus tard, elle n'est toujours pas rentrée, elle ne viendra plus maintenant; le hublot avait lu quelque part qu'elle avait peur de l'avion, mais dans la soute à bagages une hôtesse de l'air pollué a prié le juste-ciel juste au-dessus que jamais, jamais les passagers n'en vinssent à comprendre que c'était cet avion qui avait peur d'ailes : elle s'est déployée avec le vent, sous le fuselage, comme pour affiner le coefficient de pénétration dans l'air, à faire gémir de frustration les (aéro)dynamiques ingénieurs de l'Aéropastel.

 

Non, Vincent, ce n'était pas le Québec. Pas même l'Amérique. Tout juste l'Australie, à peine l'Antarctique, peut-être l'Arctique, au mieux l'Afrique, du moins la corne, sans jamais l'abondance. Et, en vérité, seulement, simplement l'Europe. Des châteaux en Espagne, c'est toujours l'Europe.

Certes, un seul et imperceptible grain de folie sous l'aile droite de ce mastodonte des cieux, et tu aurais virevolté à tribord, toutes boussoles aimantées vers les Nords perdus par la lente inclinaison, si ce n'est inclination, de la planète à perdre de sa magnétosphère : l'ère était à l'inversion des pôles, et tu allais vivre ça… C'était Byzance ! Finalement... Tu vois, c'est le Pérou, et tant pis pour toutes ces Amériques manquées, ces destinations de métempsycoses permanentes, une pinte d'horizons lointains mais si familiers où pouvoir succombe inévitablement au vouloir. Rêver suffit, le reste appartient au gouvernail du plausible itinérant.

Elle ne réapparaît plus, n'est-ce pas ? Elle transparaîtra d'un compas, naisse pluie et de cendres elle t'invitera dans son microcosme de planisphères invertébrées. Pratiquement, décérébrées. Elle n'est qu'ainsi : par petites saccades de secondes évaporées dans la sueur des dieux, elle comparaît sur l'aileron d'un avion sans pilote, et semble vouloir toujours chevaucher les nuages pour mieux les dissoudre dans la cabine pressurisée de sa cervelle de coton. Mais tu redresses ton siège comme tu allumerais un cierge, et tu te figures qu'il est l'heure pour toi de te rendre plus idiot que crétin. Car à bien y regarder elle ne vole toujours pas, à ton secours comme à ton chevet elle est vouée à obstinément s'absenter;  ce sont tes yeux, et à mal y voir tu en restes sans défense : quel est donc son sempiternel trajet ? Sa foutue trajectoire ?! Elle passe sans balises, elle rayonne sans phare, elle semble n'être qu'empreinte de cire sur ta neige de desseins inanimés. Et pourtant… Sais-tu jamais -mais non tu n'en sais rien, jamais-, ce que même les nuages savent depuis des lustres d'aéronefs : l'hôtesse-en-l'air maintes fois l'avait croisée, dans un des réacteurs de ce diplodocus des temps modernes. Et, autant de fois, omis de le signaler à qui de droit. De la signaler. Et plus de fois encore, et pour tout dire depuis cent-mille escales de mouches intersidérales, l'a détachée de tes regards sirènes, nul ne semble vouloir savoir pourquoi. Dans le cockpit mitoyen de ton âme il faudrait un passager plus clandestin qu'un nuage de lait  pour pouvoir motiver la délicatesse de la demoiselle amoureuse du cosmos…

 

… Mais non, nulle part tu ne la trouves, et quelque part où tu la découvres, à la part du diable tu ajoutes cet avion maudit : tu as consommé tout le kérosène de l'appareil digestif transcontinental, il n'en reste que la longue traînée dans le ciel, comme queue de comète en vadrouille, ou comme traînée de luxe entre les parois cotonneuses de cumulo-dingus. Car ce que tu es dingue de croire à ses plans de vol. Tout comme ce qu'elle est belle ainsi vêtue du plus simple appareil, sans besoin d'ailes, chatouillant les nuées et narguant les augustes tourbillons de si haute altitude.  Mais l'appareil semble n'avoir point ou plus de commandant à son bord, et la terre est encore ronde... Si loin déjà, mais fréquemment ronde. Impunément enceinte de sa platitude septentrionale. Un jour, supposément elle accouchera de toi dans d'atroces bonheurs. Mais tu ne cherches pas la terre, tu recherches un prodige. Une aile. Sans même promettre aux divinités qui louvoient en ces sphères altières que tu l'amarrerais à cet avion en partance pour le néant contigu. Hors de question : tu ne veux qu'elle. Et si elle devait renaître, suivrais-tu ses pas ou se bornerait-elle à guider les tiens ? Vincent plane quand Vincent voudrait planifier; fichue planisphère, elle n'y est pas, il n'osera jamais la dénicher sur le fronton du porte-bagages, parmi les cigognes et autres cendres volcaniques nouvellement arrimées aux oiseaux des hommes. Vincent tomberait de son petit nuage, elle continuerait quand même de scier la branche qui porte ce nuage-là : qui reste-t-il comme astre à errer sur le tableau de bord ? Elle n'a pour seul amant que le vent, et lui n'a pas fini de compter ce dernier; un de plus dans sa longue litanie d'ailes cabossées.

 

C'aurait pu, c'aurait dû être Byzance. Le Pérou sous la banquise, des châteaux ibères puissants, hyper marécageux, des moulins à vents aux bielles dorées, outillées par des abeilles alchimistes. Ce ne seront  rien d'autres que des ailes du désir. Vincent, il faut descendre de l'avion, tu es arrivé. Oui, Otis est une marque d'ascenseur. Non, ça n'est pas une compagnie aérienne. Et oui, l'appareil état bloqué depuis deux heures : tu peux émerger de tes rêves, la concierge doit préparer la prochaine escale avant le décollage suivant, prévu dans cinq secondes, heure locale. Température extérieure proche de ton néant intérieur. Il faut descendre, entends-tu ?! Présente ton passeport à la dame… Bigre... elle est tellement plus laide que toi : passe-lui la frontière au doigt, peut-être voudra-t-elle épouser ton silence méthodique? Banquet improvisé sur le tarmac du vestibule d'entrée, documents actés par l'ombre d'un remords, et en voiture Arthur !... Chic, le moteur démarre ! Et il a dans son sang silencieux comme une espèce de vacarme pétaradant qui rappelle méchamment celui que fait l'avion quand il franchit le mur du songe… Mais toujours pas d'elle sur cet avion de malheur. Juste Byzance façon bidonvillage, et tout droit, un autre mur. Droit dans le mur. Le mur du con.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !